Chambre de Cyprien de Cocyte

Son Ame soeur, alias Cyprien, donna un cours de langue vivante comme lui seul savait les donner. Léon manquait de pratique mais l'habileté et la maitrise de Cyprien dans ce domaine le faisait énormément progresser a chaque instant. Comment une personne pouvait-elle etre aussi douée dans une langue?
Léon se posa fugitivement la question, mais l'abandonna tout aussi vite. Apres tout ce qu'il l'interessait, c'était la pratique de la langue que Cyprien maniait a merveille, et non pas le comment du don de Cyprien pour les Langues.

Après qu'il eut reprit son souffle a la fin de ce cours intensif, Léon, avec un sourire joueur et enfantin, félicita son remarquable professeur.

"Je vois que mon professeur de langue n'a rien perdu de ses facultés d'enseignement...j'espère ne pas l'avoir deçu, je n'ai pas eu le temps de m'exercer. Peut-etre faudrait-il que je prenne des cours de rattrapage...mais qui serait apte a me donner ces cours?"

Puis Léon écouta attentivement le nouveau nom que Cyprien comptait lui donner, et le grava dans sa mémoire et dans son coeur. Coller le nom de son fiancé au sien pouvait paraitre derisoire et inutile aux yeux du monde, mais pas pour le jeune homme...
Même si aux yeux de la loi, ils n'étaient rien l'un pour l'autre, aux yeux du Coeur, ils étaient definitivement unis. Léon savait qu'il n'aimerait plus aucune autre personne que celle qui se tenait devant son regard, et il était certain que c'était reciproque.

"Je serai la personne la plus heureuse du monde si je devais porter ton nom, Cyprien."

Puis suivant les instructions de son Ange, il ferma les yeux et laissa ce dernier prendre la direction des opérations. Léon ne savait a quoi il devait s'attendre, mais il avait une totale confiance en Cyprien et donc, il ferma les yeux en tout quietude.

Les mains de Cyprien se trouverent desormais au sommet de sa tête, et le massait agréablement bien. En plus de ce massage, Léon avait droit a un shampooing effectué par son fiancé...que demander de plus?
Léon se laissa faire, les yeux toujours fermés, profitant au maximum de ce moment de sérénité que lui offrait Cyprien. Dieu seul sait qu'il aurait été capable de s'endormir tellement Cyprien lui faisait du bien...

"Hmm...Mon Ange, tu es doué pour tout. Je vais bientot me croire inutile tellement tu sais tout faire...Je me demande a quoi je sers dans notre couple..." dit-il avec un ton ironique, et avec beaucoup d'humour.

Et pendant que les mains de son Cyprien était occupé sur ses cheveux, celles de Léon avaient pris place au niveau des fesses de son fiancé...

"Quelle agréable sensation..." murmura-t-il.

Cyprien continuait à masser les cheveux de Leon en repensant aux paroles de ce dernier. Pour la vie. Toute une vie. Loin de l'effrayer, cette idée inondait son coeur d'un bonheur sans comparaison possible. Mais pourtant, il y avait cette autre sensation qu'il ne parvenait pas à expliquer.

La peur. La peur de perdre Leon, la peur que demain matin, en se réveillant, il voit une affiche dans le hall, indiquant que son fiancé avait péri en mission, sans plus de détails que cela. La peur d'avoir à contempler son cercueil après avoir contemplé sa bague de fiançailles.

Une peur irrépressible, celle de n'avoir qu'une courte vie. Car sa vie aussi était menacée. Les traitements étaient faillibles, les médecins n'étaient pas tout puissant. Et il suffisait que son trouble du pouvoir métallise sa langue pour qu'il ne puisse plus prendre son médicament correctement.

Tant de menaces planaient au dessus d'eux. Et pourtant, ils étaient là, à faire des projets sur l'avenir. Cyprien n'arrivait pas à déterminer si c'était courageux de leur part ou bien prétentieux. Il poussa un léger soupir teinté de tristesse et saisit le pommeau de douche pour rincer la tête de son fiancé.

Les paroles de Leon, une nouvelle fois, eurent la vertu de le tirer un peu de sa mélancolie craintive. Après avoir rincé les cheveux de son bien-aimé, il reposa le pommeau de douche sur son support et ses mains sur les hanches du jeune homme.

Celles de Leon semblaient avoir trouvé une place à leur convenance et Cyprien n'envisageait surtout pas de discuter l'assertion de son fiancé comme quoi c'était une agréable sensation. Bien au contraire, il partageait cette impression.

« Eh bien, tu me sers d'élève en linguistique, pour que je ne perde pas les mains. Les tiennes sont d'ailleurs bien rangées, tu es prévoyant. »

Un sourire chassa la grisaille du visage de Cyprien et le jeune homme attira son compagnon tout contre lui, soucieux de sentir la douce peau du jeune Chinois épouser la sienne, dans une caresse sensuelle et pleine de tendresse.

Son sourire disparut quelques secondes après. Il poussa un nouveau soupir. Il ne voulait pas gâcher ce moment mais il avait besoin de faire part de sa peur à Leon, espérant que son cher et tendre lui apporterait du confort comme il savait si bien le faire.

Il prit donc son courage à deux mains même si elles étaient toujours posées sur les hanches de ce corps si agréable qui était lové contre le sien et se lança.

« Tu sais, j'ai peur. Tellement peur que notre vie soit courte. Il y a ce soir, bien sûr, mais pas seulement ... Leon ... Si ... si je venais à mourir ... »

Il ne put finir sa phrase. La tristesse l'en empêchait mais, surtout, il n'en connaissait pas lui-même la fin. Que désirait-il que Leon fasse si il décédait ? Lui-même ne pourrait pas survivre à la disparition de cet homme qu'il aimait désormais plus que tout, alors il lui semblait cruel de demander quoique ce soit à son compagnon.

Il resta donc là, déposant sa tête contre l'épaule de Leon, collé contre lui, dans une douche. Il commençait à avoir un peu froid. Et puis la France lui manquait déjà terriblement. La langue, le pays. Et la peur de perdre Leon. Et la peur de ses parents, demain.

Il se serra un peu plus contre Leon, si tant est que ce fut possible. Du réconfort, un peu de réconfort.

Léon écouta gravement la peur qui s'était ancrée en Cyprien, cette peur de disparaitre et de laisser le jeune homme seul sur cette Terre, peur de ne pas avoir le temps necessaire de réaliser les projets qu'ils s'étaient prévus. Et pendant que Cyprien l'exprimait et l'avouait a Léon, ce dernier caressa tendrement la joue de son fiancé dans l'espoir de le rassurer.

Puis il essaya de trouver un quelconque argument pour démontrer au Francais que cette peur était normale mais qu'elle ne devait pas l'empecher de vivre pleinement sa vie.

"Mon Ange, tous les hommes ont peur: certains ont peur du noir, d'autres des gens et certaint ont même peur de vivre mais ils ont néanmoins tous peur de disparaitre de cette planète et de laisser les gens qu'ils aiment seuls."

Léon continuait de caresser la joue de son Cyprien, puis reprit lentement la parole. C'était la parole d'un Sage, rarement Léon ne parlait aussi sérieusement que ca, mais aujourd'hui cela touchait un sujet qu'il trouvait important a ses yeux: la vie.

"Et pourtant, tout homme doit apprendre a vivre avec. A force, cette peur devient un habit qu'on met tous les jours sur son dos, ca montre qu'on est bien conscient que cette peur existe mais qu'on ne s'en fait pas pour autant. Certains crient pour la combattre, donc subissent mais je crois que le meilleur moyen est d'en rire et de profiter pleinement de tous ces petits moments qu'offre notre vie."

Il déposa un leger baiser sur les levres de Cyprien, suivi d'un sourire reconfortant et chaleureux.

"Bien sûr qu'un jour ou un autre, l'un de nous partira avant l'autre. J'aimerai que ce jour soit le plus loin possible, mais il est impossible de prévoir quand est-ce que cela arrivera, alors au lieu de t'angoisser pour quelque chose auquel tu ne peux rien faire, profite de ce moment où l'on est tous les deux et embrasse-moi."

C'était certain que ce n'était pas le meilleur moyen de rassurer une personne qui avait peur de voir sa vie se briser d'un jour ou l'autre, mais c'était seulement réaliste. Léon ne voulait pas mentir a Cyprien, en disant qu'il serait toujours là et qu'ils vivraient longtemps et que...
Il aimait profondément son fiancé, et ne pouvait qu'esperer vivre a ses cotés le plus longtemps possible.

Cyprien laissa son regard se couler dans celui de Leon et écouta ses paroles avec attention. Son fiancé lui semblait changé ou, plutôt, il apparaissait sous un jour que Cyprien ne lui connaissait pas. Il était bien loin, le farceur avec ses plaisanteries pas toujours de bon goût. Il y avait là de la sagesse.

Vivre avec sa peur, Cyprien s'en rendait compte. Il savait que ça ne serait pas facile mais il était déterminé à ne pas laisser l'angoisse de ne plus pouvoir vivre gâcher le temps qu'il restait à vivre, justement. Vivre et non pas attendre de ne plus pouvoir le faire, voilà ce qui était important.

Il s'accorda avec la philosophie de Leon et vola ses lèvres pour un baiser plus passionné que tendre. Il glissa ensuite sa main dans celle du jeune homme et l'attira hors de la douche. Il lui lâcha ensuite la main et attrapa une serviette qu'il enroula autour de Leon, commençant à le frictionner pour le sécher.

Il s'arrête à son ventre et noua la serviette autour de la taille du jeune homme avant de s'en prendre une, de se sécher et de l'attacher autour de ses propres hanches. Il ramena ensuite Leon contre lui et lui sourit.

« Je suis bien décidé à profiter du temps que nous avons. Et si un jour on devient vieux, eh bien je prendrai le fauteuil près du feu au début de la semaine et toi à la fin. Viens ! »

Il lui attrapa à nouveau la main et l'entraîna dans la chambre. Là, il ôta leurs deux serviettes, se glissa entre les draps et invita Leon à le rejoindre. Lorsque ce fut fait, il rabattit sur eux la couverture et se colla contre son compagnon.

La douce chaleur que lui procurait la présence de Leon et le moelleux du matelas semblaient se marier pour donner à ce moment une douceur hors du commun, confortable et ouatée. Cyprien se mit à caresser doucement les épaules de son bien-aimé.

« Tu es quelqu'un d'exceptionnel, tu sais. Vraiment exceptionnel. »

Il reprit ensuite sa position préférée, déposant sa tête sur le torse de son compagnon et laissant sa main errer sur le ventre de ce dernier dans une caresse tendrement amoureuse. Un sourire avait chassé la peur de son visage.

Il poussa un soupir de satisfaction.

« Tu veux bien me parler de ta famille ? »

Même si Cyprien ne l'avouait pas, préférant se murer derrière une légèreté distraite, la famille comptait beaucoup pour lui. Il voulait en apprendre plus sur celle de Leon et, secrètement, il espérait pouvoir la rencontrer le plus vite possible et puis voir où son fiancé avait grandi.

Il ne songeait pas que le fait qu'il soit lui aussi un homme puisse nuire gravement à ses doux projets.

Léon se laissa essuyer par son Cyprien. Il avait l'air de savoir ce qu'il faisait, et le jeune homme n'opposa aucune resistance aux gestes de son Ame soeur. Ce dernier lui attacha finalement la serviette autour de sa taille, et s'essuya a son tour.

Mais visiblement, Cyprien n'avait pas l'air que de vouloir seulement essuyer Léon. Il l'entraina dans la chambre et retira la serviette attaché il y a seulement quelques secondes auparavant avant de les plonger sous les draps.

Quitter une serviette pour un drap ne faisait pas de grande difference pour Léon, du moment qu'il était avec Cyprien mais puisque cela avait l'air de plaire a son fiancé, pourquoi pas?
Un sourire effleura les levres de Léon lorsque son Ame soeur le qualifiait d'etre une personne exceptionnelle.

"En quoi suis-je exceptionnel? Mis a part le fait que je puisse me liquefier et manipuler l'eau bien sûr."

Puis Cyprien reprit la position qu'il semblait affectionner grandement, c'est-a-dire qu'il posa sa tete contre le torse de Léon puis laissa sa main se balader sur son ventre.
L'une des mains du jeune homme faisait la même ballade sur l'épaule de son fiancé, tandis que l'autre était libre et ne faisait rien.

Lorsque son Ange lui demanda de lui parler de sa famille, Léon poussa un profond soupir et leva les yeux vers le plafond. Pas que cela le genait, mais il parlait rarement de sa famille et bizarrement il ne savait pas pourquoi. Peut-etre que parce que s'il en parlait, il se rendrait compte qu'elle lui manquait terriblement...Lui était ici, aux USA et eux étaient tous restés en Chine...

"Que dire sur ma famille...Je suis l'ainé de la famille et mon petit frere a pour nom Stanislas Lei. Mon père se prénomme Yoh, c'est de lui que je tiens mon second prénom et ma mère Laura. Elle, mon frère et moi-même ne portons pas un nom tout a fait chinois car elle est en fait francaise, et Léon était le nom de son père."

Il laissa planer un silence, essayant de se rappeler de ce qu'il avait bien pu oublier, un détail ou tout autre chose susceptible d'interesser son homme. Puis d'un ton anodin, comme s'il donnait l'heure, il annonca la nouvelle suivante:

"Ah oui, il y a quelques semaines, j'ai recu une lettre de Pere me disant que la famille s'était agrandie et que désormais, il fallait compter une petite Qi Yue en tant que petite soeur. Il semblerait que Pere ait remporté cette bataille, etant donné que ma petite soeur ne porte pas de nom francais...mais bel et bien un doux prénom chinois, Yue signifiant Lune."

Il avait bel et bien raison, en parlant de sa famille a Cyprien, Léon se rendit compte a quel point il regrettait sa vie d'avant, aupres de sa famille. Il baissa le regard vers Cyprien, puis finalement ria aux eclats pour chasser la tristesse qui noircissait son coeur peu a peu.

"En y repensant, je n'ai toujours pas réalisé que j'était de nouveau grand frere...et que..."

Il s'interrompit laissant le lourd silence planer dans la chambre de Cyprien. Il ne voulait pas avouer a son fiancé que sa famille lui manquait terriblement. Bien sûr, la bas il avait un appartement a Hong-Kong, mais des que l'envie le prenait, il rendait visite a ses parents et a son frere, autant dire tous les week-ends mais maintenant qu'il était a Boston, c'était difficile...

Cyprien s'était lové contre Leon, respirant le doux parfum qu'exhalait la peau du jeune homme, encore fraîche de la caresse du gel douche. Sa main errait avec un bonheur indescriptible sur le ventre de son compagnon, une partie du corps du jeune homme qui le fascinait réellement.

Là, dans les draps, sur son lit, tout contre son fiancé, il sentait comme une douce intimité flottée dans l'atmosphère. C'était comme si cette simple couette, toute moelleuse, suffisait à les protéger contre la plupart des agressions du monde extérieur, comme si en rabattant le drap il avait jeté sur eux un bouclier et s'était enfermé dans leur monde.

Il écouta son bien-aimé parler de sa famille et à mesure que les mots sortaient de la bouche de Leon, Cyprien s'imaginait la vie que son compagnon avait vécu, il essayait d'extrapoler des traits du jeune homme le visage de ses parents, de son frère. Chaque pensée lui enlevait un sourire attendri.

Cyprien percevait également la note de tristesse dans la voix de Leon, cette nostalgie de l'attachement sentimental qu'on éprouvait pour sa famille et pour son pays. Il ne comprenait cela que trop bien et, même si ses rapports avaient été souvent tendus avec ses parents, eux et la France lui manquaient.

Une petite soeur ! Le jeune homme se demandait ce que cela pouvait bien faire, d'avoir des petits frères et soeurs. Il imaginait qu'on se sentait investi d'une sorte de responsabilité, celle de veiller sur eux et de les protéger. Lui n'avait pas connu cela et, quelque part, il le regrettait.

Le rire de Leon ne trompa pas vraiment son fiancé. Cyprien parut réfléchir un moment, une fois que le silence fut revenu. Finalement, sa main remontant jusqu'au torse de Leon et il hasarda un baiser dans le cou du jeune homme.

« Mon Ange ... Il y a des navettes qui relient la Chine et les Etats-Unis. Et ça ne prend pas tant de temps que cela. Enfin, je veux dire ... Si l'argent est le problème, pour payer le billet ... J'en ai, moi.

Il releva les yeux vers son cher et tendre.

« Est-ce que tu veux qu'on prenne des billets ? Pour aller voir ta famille, un de ces jours ? »

Si Cyprien n'avait écouté que lui, il serait parti sur le champ mais il essayait tant bien que mal de temporiser son impulsivité et son coté un peu insouciant. Il scruta dans le regard de Leon l'apparition d'une étincelle, ou de quelque chose qui puisse signifier l'approbation et surtout la joie de cet être si précieux.

Léon continuait de fixer le plafond lorsque son fiancé lui parla des navettes qui reliait les deux villes de sa vie. Sa main caressa l'épaule de Cyprien d'une facon douce et tendre, et de cette facon, il essaya peut-etre de se rassurer et de calmer la tristesse qui envahissait peu à peu son esprit et son coeur.

La seule chose qui tenait tête contre cette noirceur était la vive lueur d'Amour qu'il ressentait pour Cyprien.

"Je...euh...C'est euh...Non, je ne peux pas...Pas encore, mais je te promets que pendant les vacances, je t'y emmène."

Il redressa Cyprien sur la position assise, puis se posa sur ses jambes, passant les siennes autour de la taille de son Ame soeur. Il déposa ensuite un tendre baiser sur les levres de son fiancé, suivi d'un second sur le cou de ce dernier.

"Je suis sûr que tu plairas beaucoup a Mère et à Père. Contrairement a nos traditions, mes parents sont assez tolérants sur la chose donc ne t'inquietes pas pour ce détail. Maintenant, il faut juste que tu te tiennes bien et que tu ne les offenses pas."

Puis avec un sourire taquin, il reprit la parole.

"Père serait capable de te défier...Et crois moi, contre lui même ton métal ne sera pas de taille face a ses bourrasques..."

Léon se mit a imaginer le possible duel qui opposerait son Cyprien et Père, le métal de son amant face au vent de son paternel...ca promettait beaucoup de spectacle, et Léon serait le premier à assister a ce duel.

Cyprien fronça légèrement les sourcils lorsque Leon refusa sa proposition. Habitué aux demi-mots et aux choses masquées par la volonté de paraître normal, surtout dans la haute société, il se mit à soupçonner qu'une raison particulière poussait son compagnon à ne pas vouloir qu'il rencontre ses parents.

Il se laissa remettre en position assise et Leon se glissa tout contre lui. Cyprien déposa ses mains dans le dos de son fiancé, le caressant doucement. Il y aurait pu y avoir quelque chose de charnel dans la position de ces deux jeunes hommes nus. D'ailleurs, il y avait quelque chose de charnel et sensuel, mais ce n'était pas sexuel.

Et cela, curieusement, transporta Cyprien de bonheur. Il déposa un baiser sur les lèvres de son fiancé et laissa sa langue s'amuser quelques instants avec sa jumelle avant de permettre à Leon de reprendre le cours de ses paroles. Ce qui ramena Cyprien à ses soupçons.

Lorsque le jeune Chinois lui parla d'un duel avec son père et soulignant bien qu'il ne pouvait pas gagner, le jeune homme était totalement convaincu que, pour une raison ou une autre, Leon tentait de le dissuader de voir ses parents, de rencontrer sa famille, de se rendre en Chine.

Dans son esprit, le Français chercha inlassablement une raison qui puisse justifier cette étrange volonté. Et une raison en particulier, insupportable d'ailleurs, n'arrêtait pas de revenir à son esprit toujours hanté par l'hésitation de Leon, la toute première fois.

Il poussa un léger soupir et glissa son regard dans celui du jeune homme.

« Leon ? Est-ce que tu as honte de moi ? »

Sa voix avait pris un accent triste.

« Si c'était le cas, je ... Mon Ange, je comprendrais. Je ne suis pas exactement ... disons ... le gentil garçon qu'on présente à ses parents. Encore moins la gentille fille. »

Il esquissa un sourire un peu penaud. Ses chapeaux, ses cheveux bleus, son excentricité, il avait peur que tout cela l'éloigne de l'approbation familiale qui, malgré tout, était très importante pour lui. Se faire accepter par la famille de Leon figurait dans les premières positions de sa liste de priorité.

Il sonda le regard de son bien-aimé, y cherchant une indication. Etait-ce cela ? Etait-ce la honte qui motivait son cher et tendre ? Honte de ramener chez lui un homme ? Et qui différait en tant de choses de lui, un aristocrate, un Français, un excentrique.

Cyprien serra un peu plus son fiancé contre lui, comme pour se rassurer en attendant la réponse.

Léon ouvrit grands les yeux lorsque Cyprien conjectura sur ce que Léon ressentait. Pour le punir d'avoir laissé sortir ces paroles de sa bouche, ce dernier donna une legere tape sur les levres de son bien aimé.

"Comment peux-tu dire cela? Alors que je t'ai embrassé dans la rue, au restaurant et devant tous les élèves présents au lycée."

Il fit basculer Cyprien sur le dos, et intercala ses jambes autout de sa taille, comme pour le bloquer. Il placa sa tête au dessus de Cyprien et le regarda ardemment dans les yeux.

"Je t'ai dit que Pere et Mere seraient aux Anges de savoir que je t'ai choisi. Comme je te l'ai dit, ils n'ont aucun probleme avec ce détail. Par contre, ils, enfin Pere est tres intransigeant sur le respect et les coutumes traditionnelles et s'il arrivait que tu puisses bafouer son honneur ou salir notre nom, il te le ferait regretter."

Il prononca ces phrases avec conviction, sincérité et serieux. Puis son regard redevint doux, et Léon posa finalement sa tete a coté de celle de son fiancé.

"J'ai dit que tu n'avais aucune chance contre Pere, car c'est la vérité et non pas parce que je doute de tes capacités. Pere maitrise le vent comme personne, on dirait presqu'il n'est fait que de ce vent même s'il ne l'utilise que tres rarement."

Il caressa le visage de Cyprien tout en le renseignant sur les pouvoirs de son pere ainsi que diverses annecdoctes sur son enfance.

"Pere utilisait son pouvoir seulement pour nous punir, mon frere et moi-même. Et crois moi, des qu'on le pouvait on courrait pour pouvoir echapper a sa punition mais c'était inutile. Comment y echapper alors qu'il maitrisait l'élément qui nous entoure de partout..."

Il souriait inconsciemment lorsqu'il raconta cette histoire. Avec le recul, son enfance était vraiment mouvementée entre les crises de son père, et les innombrables betises avec son frere.

"S'il se trouve que tu en viennes a le defier, je crois que je parierais toute ma future fortune et tout la tienne sur Pere. Meme si je t'aime Cyprien, je me dois de rester réaliste et de parier contre toi. Tu m'en veux pas dis?"

Il s'était remis a califourchon sur Cyprien, et souriait d'un air taquin. Ses mains étaient posées sur le ventre de son Ange, et elles caressaient tendrement ce ventre si doux.
Puis Léon se leva, attrapa la couverture au passage et l'attache autour de sa taille.

"C'est l'heure de retourner en cours. Je m'habille et je file au lycée. Tu m'accompagne cette fois encore?"

Cyprien fit une moue innocente aux paroles de Leon mais, au fond de lui, il se sentait plus coupable qu'autre chose. Son fiancé avait raison. Comment pouvait-il encore douter de la force de l'amour qu'il lui portait ? Ce n'était pas possible, Leon lui en avait apporté bien assez de preuve.

En même temps, si cette position était sa punition pour avoir douter de lui, il avait presque envie de le faire plus souvent. Il laissa ses mains errer sur le dos puis les fesses de son compagnon. En toute innocence, naturellement, il s'agissait de se faire pardonner, rien d'autre.

Cyprien fit une légère grimace lorsqu'il fut question d'honneur. Il ne cernait pas tout à fait ce que Leon entendait parler. Il connaissait les règles de l'étiquette dans l'aristocratie française, mais déjà qu'elles différaient des anglaises, il n'osait pas imaginer ce que cela donnerait en Chine.

Il laissa Leon finir son petit laïus explicatif et esquissa un sourire tendre.

« Eh bien j'ai intérêt à potasser les traditions chinoises. »

Il esquissa un sourire légèrement malicieux et vola un baiser à Leon.

« Même si je suis sûr qu'avec une bonne stratégie, on peut toujours gagner. »

Il ne disait pas cela uniquement pour taquiner son fiancé. Cyprien pensait réellement que la stratégie était un point central des combats. Il espérait que Leon s'en souviendrait, ce soir. Ce soir ... Il chassa ce mot de son esprit et serra un peu plus le jeune homme contre lui.

Cyprien voulait qu'il vive assez longtemps pour pouvoir le présenter à ses parents et être présenté aux siens. Il laissa échapper un soupir de satisfaction à sentir son compagnon assis sur lui comme cela, tellement beau et tellement pétillant.

Il leva une main pour caresser les douces joues du mutant avant de le laisser se relever et emporter la couverture. Cyprien s'amusa de ce soudain accès de pudeur, d'autant plus que cela le laissait totalement découvert. Il sauta à son tour au pied du lit et vint enlacer son bien-aimé.

« Eh bien, étant donné que je n'ai rien à faire, je pense que je vais venir provoquer de nouveaux scandales avec toi. »

Il lui esquissa un clin d'oeil et lui offrit un baiser passionné, qu'il s'employa à faire durer le plus longtemps possible. Il se détacha finalement de lui et ouvrit sa valise, commençant à fouiller dedans, jeter des vêtements sur le lit.

Il enfila un boxer, puis un pantalon noir toujours constitué de poches. Il passa ensuite une chemise blanche dont il laissa les premiers boutons ouverts. Dans le col, il glissa une cravate rouge qu'il noua d'un noeud très lâcha. Il vissa sur sa tête un chapeau noir à bords moyens, un peu aplati.

Il se saisit enfin de son éventail et l'ouvrit. Il n'était pas mal du tout, avec une élégance excentrique et un charme fou. Il réserva à Leon son sourire le plus désarmant avant de démander :

« Je suis comment ? »

Il aurait sans doute été très, très, très malheureux si le lycée avait imposé à ses élèves de porter un uniforme strict.

Léon laissa planer un sourire sadique sur ses levres, lorsque Cyprien se disait pret a relever le défi de combattre son paternel. Un rire tout aussi sadique lui sortit de la gorge, avant qu'il ne dise ces quelques mots.

"Si tu arrives a porter un coup à Père, je t'épouse sur le champ."

Léon savait pertinnement que son Pere était intouchable. Son pouvoir était ce dont tout le monde était entouré, et donc lui également alors comment peut-on toucher quelqu'un qui peut s'il le désire vous priver d'oxygene ou alors repousser tout vos assaut par une tornade.

Bref, si son fiancé voulait se casser les dents face a son Pere, Léon ne voyait pas pourquoi il devrait l'en empecher, du moment que son paternel ne lui rende son jouet en un seul morceau et le plus intact possible...

"Bon je vais me changer dans ma chambre, je reviens puis on part au lycée. Ok mon Ange."

Il prit ses affaires, enfila tout de même son boxer et son pantalon et fila de la chambre, non sans avoir préalablement embrassé Cyprien.

"A tout de suite.."

--== Dix minutes plus tard ==--

Léon s'était changé vite fait. Apres tout, ce n'était que le lycée. Il avait changé son pantalon par un pantacourt blanc où figurait des caracteres chinois, plus précisément son prénom en Chinois.

Le haut du corps du jeune homme était recouvert d'un simple haut de couleur azure, avec un decolleté en V qui descendait jusqu'au niveau de son torse et qui n'avait pas de manches. Il portait ce haut que très rarement, vu qu'il était assez visible, que Léon le portait tres pres du corps et bien que son torse n'avait rien a envier a celui des modeles posants sur les magazines, Léon ne le montrait pas pour autant a qui le voulait.

Mais aujourd'hui, il avait envie de voir la réaction que ce vetement provoquerait chez Cyprien...Non pas l'effet que ca aurait sur lui directement, mais plutot l'effet que ca aurait lorsqu'il se pavanerait devant ses camarades de Lycée.

Une fois qu'il eut fini, Léon toqua a la porte de Cyprien et glissa sa tete a l'interieur. Son homme était habillé d'une facon tres classe, et Léon ne put qu'approuver son choix vestimentaire.
Quant a lui, Léon avait laissé son corps derriere la porte, et Cyprien ne pouvait ainsi voir comment il était vetu...c'était une surprise.

"Tu es tres beau, comme toujours mon Coeur. Bon tu viens, on va finir par etre en retard."

Il ramena sa tête derriere la porte, et attendit que son petit-ami daigne enfin sortir de sa coquette chambre pour filer ensuite a l'endroit où il était censé s'intruire...nous disons bien censé.
Il était impatient de decouvrir la reaction de son homme face a son vetement si...voyant et qui laissait peu de place a l'imagination pour ce qu'il pouvait bien cacher...

Pour passer le temps, Léon jeta un coup d'oeil a sa montre, et vit qu'il était deja si tard...que c'était l'heure que Cyprien et lui même redoutait.

"Mon Ange, c'est l'heure...je dois y aller."

Il enlaca une derniere fois son fiancé, déposa un long baiser passioné puis courut dans le couloir, se rapprochant ainsi de l'endroit où logeaient la Confrérie mais s'eloignant egalement de son Ame soeur...
Mais avant de tourner et de disparaitre de la vue de Cyprien, Léon tourna la tete et d'un sourire tendre et confiant, lui dit:

"Je t'aime, Cyprien de Cocyte. A demain, n'est-ce pas?"

Il salua son Ange de la main, puis prit le tournant et se dirigea desormais vers le lieu du rendez-vous.

Cyprien attendit que Leon finisse de se changer et revienne de sa chambre. Il l'imaginait bien passer des heures devant son miroir à soigner sa toilette même si, il fallait bien l'admettre, ce genre d'attitudes était plutôt l'apanage du Français. Mais tout de même, il trouvait l'idée attendrissante.

Pendant qu'il patientait, il remplit ses poches de paquets de cartes, bouts de ficelles et pions, tant d'objets anodins qui étaient pourtant entre ses mains des armes potentielles. Il finissait de charger les poches multiples de son pantalon de ses babioles lorsque Leon toqua à la porte.

Il sourit en voyant la tête de son fiancé passer par l'entrebâillement pour venir lui faire un compliment.

« Merci, j'arrive. »

Il vissa un peu mieux son chapeau sur sa tête et sortit de sa chambre, la fermant avant de se retourner vers son bien-aimé. Il le détailla ouvertement et tendit une main pour caresser le torse si bien mis en valeur par le vêtement du jeune homme. Cyprien s'approcha de lui et déposa ses lèvres sur les siennes.

A tous les deux, songeait-il, ils ne risquaient guère de passer inaperçus dans les couloirs du lycée. Il allait faire un compliment sur la magnifique tenue de son fiancé lorsque celui-ci lui annonça qu'il état l'heure. L'heure ? Le cerveau de Cyprien fit comme un blocage, comme s'il ne voulait pas affronter la réalité.

Mais dans la douce étreinte de Leon, teintée de tristesse, il ne put qu'entrevoir les fatales certitudes qui se profilaient à l'horizon. Il serra fort son compagnon contre lui, déposant de fréquents baisers partout sur son visage.

« Sois prudent. Et ... Enfin, n'oublie pas que le corps humain est composé principalement d'eau. Je sais que l'idée de ... d'utiliser cette information n'est pas réjouissante, mais souviens t'en. »

Il esquissa un sourire d'encouragement à l'adresse de son fiancé tandis que son coeur lui semblait s'être arrêté. Aucune larme ne venait troubler ses yeux, il n'avait pas envie que Leon s'en aille sur une note de doute ou de tristesse, ce n'était pas bon pour le moral des troupes.

Il le regarda de s'éloigner, restant immobile dans les couloirs, pâle comme un fantôme face à une éternité de souffrance. Un nouveau sourire passa sur son visage lorsque son bien-aimé se retourna une dernière fois vers lui.

« A très vite, Leon. Je t'aime de tout mon coeur. »

Finalement, cette silhouette qu'il chérissait tant disparut dans les dédales du couloir. Alors une unique larme s'échappa de l'oeil gauche de Cyprien, cascada lentement sur sa joue et s'écrasa au sol dans un petit bruit sinistre.

Ce n'était pas la dernière fois qu'il le verrait ou, tout du moins, c'était l'espoir qu'il entretenait dans son coeur. Il s'adossa à un mur et se laissa glisser à son pied, assis à même le sol, le regard perdu dans le vide, l'esprit se remémorant les moindres détails à propos de Leon.

Des souvenirs auxquels d'autres viendraient s'ajouter, plus tard. Il l'espérait, il le voulait, il le fallait. C'était plus qu'une envie puissante qui emportait son coeur tout entier, comme l'orageuse tempête fait chavirer le frêle esquif, c'était l'absolue nécessité de sa vie, désormais.

Il ne pourrait plus vivre si il savait que la Terre pleurait la perte de Leon.

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