Crème dessert [libre]

Il jeta un bref coup d'oeil par la fenêtre, répétant un mouvement qu'il avait déjà effectué une dizaine de fois en quelques minutes, dans l'espoir passablement vain de prédire la météo du jour. Mais le soleil n'avait pas encore daigné se lever, et Duncan n'aperçut sur le verre renforcé que son propre reflet qui le dévisageait d'un oeil morne et inexpressif. Son visage semblait presque livide sur la vitre, traîtreusement éclairée par les lampadaires jaunâtres du dehors et la faible lueur d'un néon solitaire et clignotant, quelque part dans un coin de la pièce.

Il avait froid. Atrocement froid. Et il regrettait amèrement de n'avoir pas embarquer sa couverture lorsqu'il lui avait parus évident qu'il lui serait impossible de se rendormir. Il avait juste eut le temps de choper son sweat de la veille. Et bien qu'il ait poussé le chauffage électrique à fond - ou du moins le jeune homme pensait se souvenir de l'avoir fait - Duncan ne pouvait s'empêcher de frictionner ses bras avec régularité, malgré l’inefficacité évidente de la manœuvre.

S'étirant paresseusement, il frotta vigoureusement l'arrière de son crâne. Un dernier coup d'oeil au miroir improvisé le convainquit de l'urgence d'un passage chez le coiffeur : certes, il était toujours aussi séduisant - et très fière du noir charbonneux et naturel de sa tignasse soyeuse - mais les mèches de cheveux sombres qui lui tombaient devant les yeux aux moindres mouvements devenaient vite agaçantes.

Dépliant ses longues jambes, Duncan sauta nonchalamment du meuble sur lequel il s'était installé et fut en quelques pas devant le réfrigérateur. Il l’ouvrit en grand, manquant de faire un bond d'horreur en arrière lorsque une bouffée d'air froid s'en échappa. Mais surmontant cet excès de délicatesse, le jeune homme choisis distraitement quelques pots de crèmes dessert - tous plus caloriques les uns que les autres - qui traînaient encore au fond du frigo, certainement rescapés des razzias incessantes des autres pensionnaires confréristes.

Enfin, se dépêchant de rejoindre la place qu'il avait réchauffée avec tendresse, il remonta d'un bond sur le plan de travail de la cuisine. S'asseyant en tailleur, marmonnant contre le froid, Duncan attrapa le premier pot - chocolat-caramel - et entreprit de remédier à cet état de manque dans lequel il était plongé de façon quasi constante depuis les premières chutes de neige. Lutter avec le sucre, contre l'ennui.

Il allait entamer le quatrième pot – praliné - lorsque une raie de lumière apparut brutalement sous la porte de la cuisine, dénonçant l'importun qui se baladait dans les couloirs à 6h15 à peine du matin. Duncan leva les yeux, le sifflotement chaotique qui s'échappait de ses lèvres se tarissant aussitôt. La porte s'ouvrit silencieusement, révélant au nouveau venu un spectacle quelques peu déconcertant.

Dans la pénombre, assis en hauteur, en jean et chaussettes, tentant distraitement d'élever une pyramide avec les pots de yaourt vide, Duncan – dans un état semi-comateux - avait suspendu son geste. Comme un renard décharné prit dans les phares d'une voiture.

L’anglais pesta une nouvelle fois contre le manque de tranquillité, inhérent semble-t-il au locaux de la Confrérie.

Terry s'était réveillé de bonne humeur ce matin. Son chat Domino était encore lové au pied de son lit, rêvant sans doute qu'il chassait des souris, lorsque son maître se glissa doucement hors de son lit. Un coup d'oeil dans le miroir et il sut que pour une fois, sa nuit fut paisible. Il ne s'était pas métamorphosé durant son sommeil...

Il prit une bonne douche, ni trop froide ni trop chaude, qui acheva de le réveiller pour de bon. Il enfila rapidement un jeans, une chemise blanche et un gros pull par dessus, car la Confrérie n'était pas assez chauffée au goût du jeune mutant. Il passa encore une fois devant son miroir et une fois que son reflet lui parut satisfaisant, il sortit de sa chambre en direction de... Il ne savait pas trop bien!

Ses pas le menèrent finalement devant la porte de la cuisine. Il lui sembla entendre tout d'un coup un mince sifflement s'interrompre brusquement. Poussé par la curiosité, le jeune mutant poussa la porte et s'engouffra dans le cuisine. Celle-ci baignait dans la pénombre mais il devina une silhouette non loin devant lui. N'étant pas encore nyctalope, Terry alluma la lumière et découvrit un spectacle assez... surprenant.

Un jeune garçon se trouvait assis sur le plan de travail, face à lui, l'air légèrement surpris, avec une pyramide de pots de yaourt dans ses bras. Terry ne savait pas très bien ce qu'il comptait faire de ces pots mais sa posture était assez comique !

Notre jeune mutant s'avança alors vers lui et lui dit en souriant en regardant de plus près la pyramide improvisée :

"Joli!"

Puis il alla se servir un bon grand verre d'eau fraîche au robinet avant de revenir près du 'sculpteur'.

"On s'est déjà croisé, il me semble, non?" demanda-t-il alors en le fixant des yeux, toujours d'une voix calme trahissant légèrement ses origines anglaises.

Le visage du jeune garçon ne lui était en effet pas étranger. Il avait certainement du le voir dans les couloirs de la Confrérie, alors qu'il explorait les lieux pour prendre ses marques.

Duncan roula des yeux. Le nouvel arrivant ne pouvait postuler ni au titre de messie et encore moins à celui de jolie créature. Il lui manquait les jambes adéquates, et d'autres choses encore. Pas que l'adolescent en face de lui - honteusement grand, facilement dix centimètres de plus que sa merveilleuse personne - soit l'inésthéticité personnifiée, mais il semblait tellement bon chic bon genre que Duncan ne chercha pas à lui trouver quelques qualités visuelles intéressantes. Et puis, il était atrocement aimable et souriant. Un gentil garçon, déjà brillant et vif à cette heure si matinale, et qui ne prit même pas la peine de faire une réflexion foireuse sur ses occupations, assez inadaptées à l'âge de Duncan - la vingtaine consommée, bien que ce soit difficilement visible. Au grand damne de ce dernier, qui aurait trouvé plaisant de débuter la journée par un échange de piques plus ou moins affectueuses avec un parfait inconnu.

Mais il avait fallu que ce soit le seul mec fréquentable de la Confrérie qui décide d'aller faire un petit tour par la cuisine, de si bonne heure, pour - Marie-Joseph bénissez le - boire un verre d'eau. Comme ça. A jeun. Duncan hocha imperceptiblement la tête pour marquer sa silencieuse désapprobation et se redressa légèrement, faisant face à son interlocuteur. Il n'avait pas fait mine d'ouvrir la bouche - pas même pour terminer son pot dont il n'avait soudain plus grande envie - depuis qu'on l'avait impoliment dérangé. C'est à peine s'il avait écarté les mèches ébène de son front pour dégager sa vue et ne pas perdre une miette de l'horrifiant spectacle de ce jeune homme trop clean pour être honnête.

L'avait-il déjà rencontré ? Duncan plissa légèrement ses yeux bleus et hocha la tête de coté, semblant jauger son interlocuteur. Où ? Quand ? La tête ne lui était même pas familière. Mais il était fort probable qu'il soit passé devant la plupart des autres confréristes, en ne retenant que quelques visages, et encore moins de nom. Repoussant sa pile de pots de crème dessert sur le côté, qui dégringola dans un joli ensemble jusque dans l'évier, Duncan répondit, peu enthousiaste, ayant un vague - et gracieux - geste du poignet pour signifier son ignorance.

"Wé. Certainement."

Il savait pertinemment que les chances d'un départ rapide de l'adolescent étaient très faibles, même s'il se montrait atrocement désagréable. Il ne chercha tout de même pas à approfondir la conversation, du moins jusqu'à ce que la porte s'ouvre encore une fois. Grand - trop - et apparemment plutôt bien bâtis, le mutant renfrogné qui débarqua dans la cuisine ne leur adressa pas un regard et se précipita silencieuse jusqu'au frigidaire. Duncan admira le respect qu'il semblait accorder à la tranquillité d'autrui - et regretta que cette valeur ne soit pas partagée par plus de gens.

Bien qu'aucun trait du visage délicat - pour ne pas dire féminin – du jeune anglais ne trahirent son intérêt, il nota tout de même l'étrange tatouage qui s'entrelaçaient sur les tempes et une estafilade rougeâtre qui révélait le frottement d'une balle sur le crâne. L'attitude et l'aspect du mutant contrastaient avec le gentil adolescent qui avait fait plutôt son entrée, et quelques soit son pouvoir - et malgré son évidente jeunesse - il ne semblait pas complaisant. Les lèvres de Duncan frémirent et il retint un sourire. Et il eut soudain très envie de brownie.

"Ton nom m'échappe...?"

Brisant presque à contre coeur le silence qui s'était installé, il avait reporté son attention sur l'adolescent qui se tenait près de lui. Un minimum de politesse ne l'écorcherait pas, et il faisait toujours bon de passer pour un jeune homme aimable et bien rasé. Pourtant, trahissant aussitôt ses bonnes résolutions, il interpella brusquement le mutant attablé, ayant le prudence toute fois d'intimer à ses paroles une nuance d'interrogation, et à ses sourcils un haussement incertain.

"Eh le tatoué …! Tu m'envois un morceau de brownie ?"

Une lueur dans ses yeux bleus, Duncan ne parvint pas à décider s'il préférait que l'imposant mutant partage sans rechigner, ou qu'il se froisse devant ses manières passablement cavalières.

C'était au tour de Tsi de débarquer dans la cuisine. Elle s'était entraîné tôt dans la mâtinée et l'effort physique lui avait mis l'estomac dans les talons. Si elle se serait écoutée, elle serait directement venue a la cuisine. Au lieu de cela, elle prit sur elle pour aller se doucher, faire son lit et s'habiller. Tout cela dans cet ordre. Elle aurait bien aimé passer voir Mentat mais elle ne savait pas si il était déjà réveillé, de plus elle n'arrivait toujours pas a situer s'il souhaitait garder leur relation secrète ou si il cela lui était complètement égal.

Alors qu'elle enfilait un pull a col roulée, elle se dit qu'elle devrait tirer la situation au clair. Elle se fit un chignon lâche avant de descendre, enfin, dans la cuisine. Il y avait déjà du monde au vu des bruits de conversation qu'elle entendait. Elle se demandait qui pouvait être bien matinal, de toute manière, l'éventualité de petit déjeuner avec quelqu'un l'enchantait. C'était triste de manger toute seule...

Il y avait trois personnes, que des gars ! La Tsipora d'il y a deux ou trois mois aurait roucoulé de joie. Mais bon, elle était casée maintenant, et moins superficielle. Elle essayait en tout cas.

"Salut Terry, tu as passé une bonne nuit ?"

C'était la première personne qu'elle avait reconnu, l'autre rasé lui était vaguement familier. Quelque chose dans le regard...elle fit les yeux gros en le remettant.

"Ouaaaaiss Kenjissssssss !"

Toute dans sa joie, l'adolescente se précipita vers le mutant, lui appliqua deux baisers sonores sur chaque joues, le regarda un peu avant de le serrer dans ses bras.

"J'ai cru que tu été mort, tué par les sentinelles. Si tu savais comme je suis contente de revoir. Tu étais passe ou ?"

La mutante débordait presque d'amour, rien ne semblait pouvoir atténuer sa bonne humeur...jusqu'à ce que son regard tombe sur le troisième occupant.

"Ah...t'es la toi..."

Humm l'acceuil était tout a coup beaucoup moins chaleureux. Il ne lui avait pas fait une bonne impression la première fois et elle n'avait pas essayé de le connaître plus. Elle avait d'autres chats a fouetter aussi. La seule fois ou elle avait croisé par hasard Duncan, elle avait fait volte-face quitte a paraître impolie ou être apeuré par ce dernier...


[[hrp : ca fait longtemps que je n'ai pas rp avec keni , t'es heureux hein, hein ? ]]

Le jeune mutant terminait son verre d'eau lorsqu'une autre personne fit irruption dans la cuisine. Un coup d'oeil de la part du Caméléon suffit pour se rendre compte qu'il ne connaissait pas le nouveau venu. Aucun doute. Il s'en souviendrait s'il l'avait déjà croisé, une telle apparence ne s'oubliait pas... Pourtant, celui-ci semblait être un habitué des lieux. Peut-être était-il de retour après de vacances? Après tout, c'était la saison. Mais sa raison lui soufflait que non. L'allure de l'inconnu ne cadrait pas vraiment avec celle d'une personne qui revenait de vacances. A le voir ainsi, on aurait dit qu'il venait de subir un entrainement militaire!

Voyant qu'il ne manifesta pas l'attention de leur addresser la parole, Terry reporta son attention sur le mutant aux pots de yaourt. Lui non plus ne semblait pas très entrain à parler.

*m'enfin, c'est une école de sourd-muets ou quoi?*

L'adolescent était légèrement déçu d'une telle attitude. Lui qui aimait bien parler d'ordinaire. Après l'accident, il s'était refermé sur lui-même car il s'était retrouvé seul. Et ce moment n'avait pas vraiment été le plus gai de sa vie. En venant ici, à la Confrérie, où il se retrouveraient entourés de gens comme lui, il avait espéré que ce mur de solitude se briserait... Eh ben, c'était pas encore gagné!

Mais passons. Le 'sculpteur, comme il l'avait surnommé, se décida enfin à prendre la parole et lui confirmer qu'ils s'étaient peut-être déjà croisés et lui avouer qu'il ne se souvenait pas de son nom.

"Terry, lui répondit notre Anglais, et toi, c'est comment déjà?"

Entre temps, le mutant tatoué avait entammé un brownie dans son coin. Mais Terry, contrairement à l'autre mutant, ne lui demanderait pas de morceaux, un brownie aussi tôt dans la journée, non merci! A la place, il reprit un verre d'eau qu'il vida presque d'une traite.

C'est à ce moment-là qu'une troisième personne entra. Cette fois, Terry la reconnut. Et la nouvelle arrivante aussi. Elle le salua chaleureusement et Méléon sentit son moral remonter de quelques barres. Il y avait au moins quelqu'un ici qui savait aligner plus de deux mots dans une phrase.

"Ca va bien, et toi?" répondit-il à Tsipora en souriant.

En dehors de Malaika, c'était peut-être la personne avec qui il avait déjà parlé le plus ici. Et dire que le jour où il était arrivé, elle se méfiait de lui... Rien que d'y repenser, cela le fit sourire encore plus.

Mais il fut brusquement interrompu dans sa rêverie lorsque Tsipora se mit à crier de joie en reconnaissant le tatoué. Terry avait donc bien deviné que celui-ci n'était pas un nouveau. Il ne l'avait juste jamais vu, mais il devait certainement être arrivé avant lui à la Confrérie.

Par contre quand Tsipora s'aperçut de la présence de l'autre mutant, son ton changea radicalement, passant de la joie des retrouvailles au quasi mépris. Terry en déduit qu'elle avait déjà du croiser son chemin et que cela ne devait pas s'être très bien passé...

Kenjiss releva la tête lorsqu’un des deux ado présent dans la pièce l’interpella. Le plus petit des deux mais également le moins souriant. Le tatoué regarda l’autre dans les yeux quelques secondes, essayant de discerner une quelconque plaisanterie. Il ne le connaissait pas et voilà que l’autre lui parlait comme à un chien ? Le mutant tatoué examina sérieusement quelques secondes la probabilité que l’autre finisse avec un poignard entre les yeux pour finalement se raisonner en se disant qu’il n’aurait probablement pas le temps de manger ensuite. Mauvaise solution donc. Le jeune tatoué se contenta donc d’une moue goguenarde en levant un morceau de brownie à hauteur de ses yeux… avant de l’engloutir consciencieusement.

Nan. Pas envie finalement. Viens en chercher si ça te chante…

Un poil agressif, provocateur, le ton de Kenjiss n’avait pas changé d’un poil en un mois. Il était toujours aussi direct et désagréable avec ceux qui le prenait de haut. Mais n’était il pas désagréable avec tout le monde ? Chassant ces pensées pourtant véridiques de son esprit, Kenjiss fixait l’autre mutant avec un sourire provocateur lorsqu’une tornade qu’il ne connaissait que trop bien jaillit dans la cuisine. Une catastrophe pire que l’invasion de sauterelle, la peste, le choléra, l’apocalypse et la fin de l’univers réunis. Une catastrophe nommée Tsipora, une adolescente charmante et bavarde comme une pie qui avait l’art et la manière de le gêner ou de le confronter à ce qu’un adolescent type « normal » devrait être. En d’autre terme il l’adorait… à sa façon.

Salut Tsi, qu’est ce que tu…

Sauf qu’elle aussi l’adorait visiblement mais à sa façon à elle ce qui fait que le pauvre tatoué asocial se retrouva embrassé et serré dans les bras de celle qu’il avait traumatisé en la rencontrant, puis avec qui il avait hum… « sympathisé » quand elle ouvrait et refermait alternativement ses blessures. Kenjiss eut un gros instant d’hésitation avant de lui rendre ses embrassades, maladroitement m’enfin c’était l’effet qui comptait. Tsi avait toujours été sympa et plus ou moins compréhensive alors… Un peu gêné quand même par l’étreinte de l’adolescente, Kenjiss le fut beaucoup moins à ses questions. Au moins la il pouvait s’en tirer par une légère pirouette (avouer qu’il avait tué pas mal de personnes ces derniers temps à une adolescente exubérante et sensible n’était sans doute pas l’idée du siècle).

Mort ? Les autres oui… Kenjiss rattrapa son début morbide et modifia son sourire sadique en un sourire amical en se traitant de tous les noms. Enfin Bérénice je veux dire. Les sentinelles ? Ben avec Tyf, on y a pas échappé facilement quand même… Il leva sa main gauche, affichant clairement ses doigts manquant en se demandant comment Tsipora réagirait. Après ben euh… Jme suis baladé, j’ai retrouvé des vieux amis, j’ai guérit avant de revenir ici…

Kenjiss acheva sa tirade en trouvant qu’il s’en était pas trop mal tiré étant donné qu’il avait perdu l’habitude de faire des phrases aussi longues, surtout lorsqu’il devait masquer le fait qu’il avait tué. Il se doutait bien de ne pas avoir été convaincant mais peut être Tsipora allait elle lui laisser ses secrets ? En tout cas elle ne semblait pas apprécier le mec à qui il avait refusé le brownie. Bon au moins il n’avait pas choisit une mauvaise cible. Ne connaissant pas du tout l’autre mec « Terry », le tatoué se contenta d’un léger signe de tête en guise de salut. Il ferait connaissance plus tard. Ou pas…

Tsi, tu veux un brownie ?

Sourire provocateur encore. L’autre ado avait l’air peu aimé ici, et il ne s’était pas attiré les faveurs du tatoué en l’apostrophant ainsi. Donc Kenjiss en profitait. Et si l’autre devenait plus agressif, nul doute qu’un brownie viendrait s’écraser sur sa tronche avant qu’une lame ne se pose sur sa gorge. Même en présence d’une amie.

[Heureux n'est pas le terme qui conviendrait Meuh si jsui content ]

L'ado - de vingt-deux ans, dois-je le rappeler, et ce malgré son mètre soixante-treize - esquissa un sourire ravi. Mais c'est qu'il mordrait le petit mutant. Certes, s'il réussissait à se donner l'apparence du méchant combattant, le rôle était légèrement surjoué, et il était passablement difficile pour Duncan de le prendre au sérieux. Son visage, que le tatouage tribal - et inesthétique - vieillissait quelque peu, n'avait cependant pas encore perdu ses rondeurs adolescentes - et l'Anglais pouvait parier sans grand risque que le petit rebelle était toujours imberbe. Tout de même, il était bien cruel de lui refuser une friandise à cette heure si matinale de la journée.

"Tss. Quel manque de respect flagrant pour ses aînés..." susurra le brun, avec un nouvel hochement de tête désapprobateur, une lueur folle dansant dans ses yeux clairs.

Se laissant glisser sur le sol avec nonchalance, il épousseta distraitement son jean, décidant que le chocolat passait, sans hésitations aucune, avant un gosse sans manière. Mais avant qu'il n'est put faire un geste, la porte s'ouvrit une nouvelle fois, à la volée, laissant l'entrée libre à une autre fillette. Qu'il était certain d'avoir déjà rencontré. La question était de savoir dans quelles conditions, et quelle attitude il était sensé adopter avec elle. Prudent, Duncan ne fit pas mine de la saluer, tentant d'abord de remettre un nom, ou du moins un souvenir sur cette adolescente. Particulièrement expansive, s'il en croyait l'étreinte passionnée auquel avait droit 'Kenjisssssss', si tel devait être son nom.

Bien entendu, l'agressif mutant perdit autant de crédibilité que 'Tsi' planta de baisers humides sur ses joues. Charmant. Duncan se permit un ricanement moqueur, ricanement qui du certainement attirer l'attention de la demoiselle. Elle se tourna vers lui, sa chaleur fondant comme neige au soleil pour un air passablement dégoûté. A l'expression antipathique visible sur le visage de Tsipora, la mémoire du jeune homme eut un bref sursaut. Ah oui. Effectivement. Ils avaient déjà eu le plaisir de se rencontrer.

"Tiens... la furie. T'aurais pas prit quelques centimètres depuis la dernière fois ?" Duncan imprima à son sourire visiblement forcé une once de paternalisme, dans le but avoué d'agacer l'adolescente.

Mais déjà Kenjiss cherchait à s'en attirer les faveurs, étalant ses blessures de guerre avec un flegme exubérant. Très chou. Et Bérénice, quel joli prénom. Duncan, le regard vide, roula des yeux et se redressa finalement, enfonçant ses mains dans ses poches, à la recherche d'un paquet de clopes qui ne s'y trouvait pas. Merde. Il ne se sentait pas d'humeur à supporter les faux semblants d'une bande d'ado sans un minimum de nicotine dans le sang.

Ignorant délibérément la provocation peu subtile de Kenjiss, le jeune homme s'appuya distraitement contre la table de la cuisine. Il piqua un bout de chocolat dans le paquet en cellophane, accrochant le regard de Terry.

"Moi c'est Duncan." Il prit le temps d'avaler le misérable brownie dont on avait fait toute une histoire et ajouta, apparemment sincèrement intéressé : "Et t'es là depuis quand ? Si je ne suis pas indiscret."

Oh. Duncan esquissa une moue enfantine : il y avait un trou dans sa chaussette droite. Malheur. Et aucun mutant pouvant faire office de chauffage central à l'horizon. Quel manque de chance, vraiment.

L’arrivée de Tsipora sembla avoir délié la langue du jeune Kenjiss. Celui-ci, après s’être non sans peine sorti des effusions de Tsipora, lui raconta ce qu’il lui était arrivé et ce qu’il avait fait pendant le mois qui venait de s’écouler. Le jeune mutant sentit que son récit demeurait bien bref et pour le moins imprécis, mais il s’en contenta. Après tout ce n’était pas ses affaires. Ce qui attira davantage son attention, c’était cette histoire de Sentinelles. C’était ça, l’agitation et cet immense truc volant qu’il avait vu dans le parc avec Malaika. Ce soir-là. Et apparemment Kenjiss y était…

Finalement, le tatoué fit signe à Terry mais dévisagea l’autre mutant. Sans doute, n’avait-il pas apprécié la manière avec laquelle il s’était adressé à lui. Et vu l’individu, ce ne serait pas étonnant. Terry comprit alors rapidement qu’il ne valait mieux pas compter Kenjiss parmis ses ennemis, même si son tempérament semblait encore guidé par la fougue de son jeune âge…

Comme pour le provoquer davantage, il proposa un morceau de brownie qu’il venait de refuser au mutant à côté de lui, à Tsipora. Heureusement, celui-ci ne sembla pas s’en offusquer. Même, il n’y porta pas davantage d’attention car il reposa bien vite ses yeux sur Terry pour enfin lui apprendre son prénom. Duncan. Etrangement, le Caméléon sentit que ce nom lui allait comme un gant. Fier et prétentieux à la fois. Il fut légèrement étonné lorsque Duncan continua la conversation, lui qui ne semblait guère bavard à son arrivée.

"Ca fait plus ou moins un mois, que je suis à la Confrérie… En fait, je suis arrivé le jour de l’attaque des Sentinelles "

Au bout d’un moment, Tsipora proposa des crêpes à l’assemblée et Terry acquiesça. Il adorait ça et ça faisait longtemps qu’il n’en n’avait plus mangées ! Malheureusement, l’arrivée de Nelson, le majordome allait encore retarder le moment où le jeune mutant pourrait à nouveau goûter la délicieuse saveur des crêpes. Le vieil homme les réprimanda pour s’être servis dans le frigo avant de les prier de sortir de la cuisine pour aller déjeuner dans la salle manger. Terry le considéra d’un œil distrait. Certes, il aimait aussi les croissants, mais les crêpes, c’était quand même mieux !

"Je veux bien vous suivre, si vous nous apporter des crêpes, Nelson !" lança-t-il joyeusement à l’attention du majordome.

*on sait jamais qu’il serait d’accord…* pensa Terry, optimiste.

(Salle à manger)

Kenjiss ne répliqua pas aux remarque de Duncan. Ainé ? Le mutant pencha légèrement la tête de côté comme s'il examinait une curieuse bête dans un zoo. Ah oui peut être... En tout cas avec ce visage à la limite du féminin il n'aurait pas pus déterminer son age. Peu importe. Kenjiss observa d'un air amusé l'échange verbal entre Tsi et Duncan pour finir par y mettre son grain de sel, fixant toujours "l'ainé" du groupe avec un regard à présent vaguement méchant.

Tss. Quel manque de respect flagrant pour une femme...

Kenjiss ou l'art de retourner les répliques des autres contre eux. Bien évidement il devait s'attendre à une réponse mettant en doute l'âge ou le sexe de la demoiselle qui se tenait à ses côtés mais peu importe. Le regard du jeune tatoué ne décrocha de Duncan que lorsque la dite demoiselle lui proposa de remplacer ses doigts.

Nan je les ai pas gardés, d'ailleurs ils étaient pas en état d'être réparés je crois. Et non merci pour ta proposition. J'ai merdé, j'en ai eu la sanction immédiate. C'est ma faute, je serais plus prudent à l'avenir... Au moins ça me rappellera à l'ordre. Merci quand même pour la proposition.

Et le pire, s'aperçut il en parlant, c'est qu'il croyait vraiment ce qu'il racontait... Ses doigts n'étaient que la juste récompense d'un moment ou il avait agit inconsciement, sans prendre le temps de calculer les risques ni de préparer une riposte. Cela avait failli ce solder par la mort d'une mutante en plus de la sienne. Plus question de refaire une connerie pareille. Mais si les équipes étaient toujours d'actualité, Kenjiss allait devoir apprendre à faire avec. Et ça c'était pas gagné. Le jeune mutant cligna deux trois fois des paupières en s'apercevant qu'il plongeait de plus en plus dans ses pensés. Terry proposait à Nelson de leur apporter des crêpes. Pourquoi déja ? Ah oui, le majordome qui leur proposait de passer dans la salle à manger. Sans ajouter un mot, Kenjiss engloutit le reste de son brownie et bondit par dessus la table pour franchir la porte de la cuisine. Un bond de deux mètres sur un, pas vraiment un exploit pour lui, mais c'était toujours bon de se dérouiller un peu (et sans doute de pouvoir frimer un poil avec ses yeux qui étaient brusquement passés à l'argenté). Le jeune mutant n'attendit pas les réprimandes du majordome qui n'aillaient peut être pas tarder s'il revenait et partit vers la salle à manger. Il avait encore faim... Conséquence de son pouvoir sans doute, il engloutissait l'équivalent de la portion d'un bataillon de marines en un mois à lui seul ou presque...

[=> Salle à manger (je posterais sans doute ce soir]

Duncan rejeta la tête en arrière pour pouvoir rencontrer le regard de Tsipora - hargneuse, pour changer - quelque part sur sa gauche. L'insulte éhontée concernant sa taille, certes peu impressionnante, ne l'avait guère surpris. Il la jugea d'ailleurs facile et peu originale, ce qui ne l'empêcha tout de même pas de répliquer, le sourire charmeur et la voix traînante.

"Le poids de l'expérience, mon ange..."

Un haussement d'épaule nonchalant, retenant une grimace enfantine qui aurait anéantit son effet, Duncan soutint le regard brûlant de Kenjiss. Ce dernier était apparemment près à défendre son amie très chère contre les bas sarcasmes que se permettait peu galament l'anglais. Le principe était adorable. Le mutant qui montrait quasiment les crocs l'était sans doutes bien moins. Duncan avait du le froisser sans s'en rendre compte, à un moment ou à un autre de la conversation. C'était évidement bien regrettable, mais tant que l'adolescent ne ferait pas mine de s'introduire de force dans son espace vital, rien de fâcheux ne pourrait arriver. Pour eux tous, s'entend.

"Je n'ai jamais considéré la féminité comme une valeur augmentant la respectabilité d'un individu. Au contraire de la maturité et de la sagesse."

Ponctuant ces paroles hautement moralistes d'un lent mouvement de tête, le jeune homme se promit d'oublier ces dernières paroles qu'il n'aurait sans doute pas proféré d'en d'autres circonstances, et ce aussitôt la pièce quittée. Mais pour une fois que le droit d'aînesse lui revenait, il fallait bien en profiter un minimum. Après tout, ne disait-on pas que le borgne est un roi au pays des aveugles ?

Satisfait de som implacable logique, Duncan reporta son attention sur Terry, qui par un plaisant hasard avait emménagé dans les locaux confréristes le même jour que lui. Et c'est bien entendu à ce moment là que l'aîné par excellence de la Confrérie fit son entrée dans la pièce, tout aussi hystérique et maniaque que dans ses souvenirs. Nelson, très cher, venait mettre bon ordre dans cette orgie alimentaire. Et les jeter dehors par la même occasion, lui - qui aurait bien approuvé l'idée de Tsipora, une fois n'est pas coutume - comme les autres, avec cette autorité manifeste que donne un réel écart d'âge.

"Excusez-les Nelson. Ils sont en pleine croissance, et les adolescents - avec leurs hormones et tout ça - ont besoin d'énoormément de calories."

Sourire colgate, respirant l'innocence et le savoir vivre, Duncan déclina l'agréable suggestion du majordome - il ne mangeait quasiment jamais à l'heure des repas - et salua chaleureusement Terry, lui promettant de reprendre cette passionnante conversation dans les plus brefs délais. C'est du moins ce que signifiait son bref signe de la main - main qui avait d'ailleurs grandement besoin d'une manucure.

Avec un dernier sourire espiègle, et un clin d'oeil affectueux pour Kenjiss qui tentait vainement d'impressionner la galerie à l'aide de son pouvoir, Duncan disparut de l'autre côté du couloir.